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17 novembre 2024 7 17 /11 /novembre /2024 14:07

La commune d’Etival-Lès-Le Mans (Sarthe) possède un riche passé ; on ne manquera pas de visiter son église romane qui est, architecturalement parlant, des plus belles du canton de La Suze (Sarthe).

Quelques trouvailles archéologiques ont été faites sur le territoire communal. La plus importante découverte fut un trésor monétaire composé de 3369 pièces romaines. La prospection aérienne a également apporté des informations nouvelles. Un enclos circulaire a été vu en 1998 (il était à nouveau visible en juin 2006) ; en 1990, un petit bâtiment rectangulaire pouvant correspondre à une petite villa est apparu dans les cultures. L’activité sidérurgique est également bien présente dans la commune ; au 19ème siècle, on signale plusieurs amas de scories mais sans localisation. Un toponyme très révélateur attire l’attention : la Ferrière.

Les prospections ont révélé une présence préhistorique avec un certain nombre d’outils en silex. Parmi ces objets qui remontent à la Préhistoire, signalons une armature de flèche longue de 28 mm, large de 21 mm du côté du tranchant et épaisse de 3 mm. Le matériau est un silex orangé fin qui rend cette armature translucide. C’est l’extrémité la plus étroite qui était fixée dans la hampe de la flèche ; la partie la plus large (le tranchant) blessait la victime. On peut dater cet objet du milieu du néolithique, c'est-à-dire vers 4300 à 3300 av. J.-C.

Etival-Lès-Le Mans (Sarthe) - armature néolithique

Etival-Lès-Le Mans (Sarthe) - armature néolithique

Etival-Lès-Le Mans (Sarthe) - armature néolithique

Etival-Lès-Le Mans (Sarthe) - armature néolithique

Rappel de la loi : La prospection archéologique est soumise à autorisation administrative délivrée par le préfet de région. L’utilisation des détecteurs de métaux dans les parcelles qui recèlent des vestiges archéologiques est strictement interdite. Le non respect de la loi est soumis à de lourdes sanctions.

Code du Patrimoine :

Art. L. 531-1 – Nul ne peut effectuer sur un terrain lui appartenant ou appartenant à autrui des fouilles ou des sondages à l'effet de recherches de monuments ou d'objets pouvant intéresser la préhistoire, l'histoire, l'art ou l'archéologie, sans en avoir au préalable obtenu l'autorisation.

La demande d'autorisation doit être adressée à l'autorité administrative ; elle indique l'endroit exact, la portée générale et la durée approximative des travaux à entreprendre.

Dans le délai, fixé par voie réglementaire, qui suit cette demande et après avis de l'organisme scientifique consultatif compétent, l'autorité administrative accorde, s'il y a lieu, l'autorisation de fouiller. Elle fixe en même temps les prescriptions suivant lesquelles les recherches devront être réalisées.

Art. L. 542-1 - Nul ne peut utiliser du matériel permettant la détection d'objets métalliques, à l'effet de recherches de monuments et d'objets pouvant intéresser la préhistoire, l'histoire, l'art ou l'archéologie, sans avoir, au préalable, obtenu une autorisation administrative délivrée en fonction de la qualification du demandeur ainsi que de la nature et des modalités de la recherche.

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12 octobre 2024 6 12 /10 /octobre /2024 17:29

La commune de Fillé est connue pour son moulin que l’on peut dater du Moyen-Age, mais sans pouvoir donner un siècle avec précision. Ce moulin était rattaché à la seigneurie de Buffes. Mais les prospections archéologiques sur le territoire communal ont permis de reculer de quelques milliers d’années l’activité de production de farine dans ce secteur géographique.

Une parcelle, proche du Clos Colin à Fillé, a livré une meule dormante à va-et-vient datant de l’époque néolithique (6000 av. J.-C. jusqu’à 2200 av. J.-C.) ; certaines ont pu être utilisées jusqu’à l’âge du Fer. Il s’agit d’un gros bloc de grès pesant presque 9 kg, mesurant 35 cm sur 28 cm. La face inférieure, naturelle, est bosselée. La face supérieure a été piquetée et aplanie pour la rendre abrasive.

Meule néolithique, face supérieure, Fillé (Sarthe)

Meule néolithique, face supérieure, Fillé (Sarthe)

Meule néolithique, profil, Fillé (Sarthe)

Meule néolithique, profil, Fillé (Sarthe)

Les fouilles menées en 1999 sur le site du Parc à Vivoin avaient amené la découverte d’une meule sur un site d’habitat néolithique moyen. Un autre exemplaire est également signalé en fouille sur la commune de Fyé. Les prospections archéologiques pédestres ont également permis de repérer d’autres meules comme à Conlie ( meule dite à cuvette).

Meule à cuvette, Conlie (Sarthe)

Meule à cuvette, Conlie (Sarthe)

A partir du 2ème siècle av. J.-C., un autre type de meule apparaît : la meule rotative. Elle est composée d’une partie « dormante » (meta) et une partie « mouvante » (catillus). On installe alors un manche en bois dans un trou sur le côté du catillus afin d’exercer un mouvement rotatif qui écrasera les grains entre les deux parties de la meule.

Meule rotative (catillus)  provenant de Oisseau le Petit (72). Son diamètre est de 42 cm.

Meule rotative (catillus) provenant de Oisseau le Petit (72). Son diamètre est de 42 cm.

En haut, le trou par où est versé le grain. Sur le flanc, le trou pour le manche en bois permettant d'actionner la meule.

En haut, le trou par où est versé le grain. Sur le flanc, le trou pour le manche en bois permettant d'actionner la meule.

Les découvertes de meules à va-et-vient sont relativement rares. Elles ont parfois été cassées ou réemployées dans des murs. Celle du Clos Colin à Fillé aurait pu servir de borne pour limiter une parcelle.

Par contre les meules rotatives sont plus fréquentes, mais on trouve surtout des morceaux et rarement la meule entière. C’est le cas par exemple à Voivres où trois morceaux ont été découverts en prospection.

Ces meules servaient à écraser du grain bien sûr mais aussi d’autres produits (légumineuses, glands, chamotte, etc.). A Voivres, un morceau a été découvert sur des vestiges de bas fourneaux et on peut se demander si cette meule n’a pas servi à broyer du minerai de fer.

Voivres Lès Le Mans (Sarthe)

Voivres Lès Le Mans (Sarthe)

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15 juillet 2024 1 15 /07 /juillet /2024 10:42

La rivière Sarthe naît dans le département de l’Orne en la commune de Soligny-la-Trappe au lieu-dit Somsarthe à l’altitude de 205 m. Elle entre dans le département auquel elle donne son nom, au niveau de la commune de Roullée ; puis ensuite elle sert pendant de nombreux kilomètres de limite départementale entre l’Orne et la Sarthe. Elle entre alors pleinement dans le département sarthois au niveau de Saint Léonard des Bois pour en ressortir à Précigné en ayant, là encore, servi de limite départementale. Le cours d’eau poursuit alors son cheminement dans le Maine-et-Loire où, rejoignant la Mayenne, il formera la Maine. La Sarthe aura alors parcouru un peu plus de 300 km.

Carte de Jaillot (1706)

Carte de Jaillot (1706)

Fontaine Saint Clair à Saint-Aquilin (AD61)

Fontaine Saint Clair à Saint-Aquilin (AD61)

La vallée de la Sarthe à La Fresnaye sur Chédouet

La vallée de la Sarthe à La Fresnaye sur Chédouet

La Sarthe à Pincé

La Sarthe à Pincé

La première partie de son parcours la fait longer la partie orientale du Massif Armoricain en traversant les Alpes Mancelles ; elle a alors un aspect torrentueux. Puis après Fresnay-sur-Sarthe, elle atteint les zones plus planes et serpente au travers de la campagne au milieu des prés. La rivière s’élargit et prend un aspect plus calme. Elle est rejointe au Mans par l’Huisne ; en voici d’ailleurs une description dans un ouvrage de 1620 : « Huine donc ainsi grossie et accreuë descend à Seaux, Pont de Genne, Champigny,Yvré, et à Pontleue prés du Mans, au dessous duquel elle se descharge dedans Sarthe sa sœur aisnée, à laquelle elle est contrainte de ceder son nom, et dedespit qu'elle en a, marche plus de deux grandes lieuës coste à coste, sansse vouloir mesler avec elle, et se faisant recognoistre en ses eaux claires et blanches d'avec celles de Sarthe noirastres et sombres1 ».

1BRY DE LA CLERGERIE (Gilles), Histoire des pays et comté du Perche et duché d'Alençon, 1620, p.13

La Sarthe à Saint Léonard des Bois

La Sarthe à Saint Léonard des Bois

Fresnay sur Sarthe

Fresnay sur Sarthe

Neuville sur Sarthe

Neuville sur Sarthe

Solesmes

Solesmes

Un nom stable dans le temps

Son nom a peu évolué dans le temps, ce qui laisse à penser qu’il s’agit d’un toponyme très proche de son nom originel. Il apparaît de très nombreuses fois dans les Actus pontficum cenomannis in urbe degentium. Si l’on considère que les Gesta Innocentii, qui racontent les actes de l’évêque manceau Innocent (533-558), s’appuient sur des documents connus au moment de la rédaction des dits Actus1 (vers 835-855), il y est dit que l’évêque Victeur avait fait construire une église où reposent ses successeurs « ultra fluvium Sartae » ; il pourrait donc s’agir du nom connu au VIème siècle. Au VIIème siècle, les Gesta Domni Bertichramni (testament de Saint Bertrand) donnent aussi la forme « Sartae » (Antedictus namque domnus Bertichramnus fecit quandam cellulam ultra fluvium Sartae).

Un diplôme de 676 de Thierry III, roi des Francs, fait mention de l’installation au Mans du monastère Sainte Marie « infra Sartam fluvium »2. Les Actus Pontificum, dans un texte des environs de 835 relatant la translation de la dépouille de Julien depuis le quartier du Pré vers la cathédrale nouvellement édifiée par l’évêque Aldric, citent également « ultra fluvium Sartae ». Le Livre Noir de l’abbaye Saint Florent de Saumur en Anjou rapporte pour l’année 848 l’expression « Sartam fluvium » dans un diplôme concernant un don à ladite abbaye.

On pourrait ainsi multiplier les exemples à l’envi.

1BIARNE (Jacques), Les premiers évêques du Mans, depuis les Fastes épiscopaux de Louis Duchesne, in La foi dans le siècle, PUR, 2009, p. 109-119

2BREQUIGNY (Louis George Oudard Feudrix de), PORTE DU THEIL (François Jean Gabriel de La ), Diplomata, chartae, epistolae, leges, Tome II, Paris, 1849, p. 172

Le Livre Noir (IXème siècle)

Le Livre Noir (IXème siècle)

Qu’en est-il du « h » dans la Sarthe ?

On lit parfois que c’est au moment de la Révolution que la lettre « h » est apparue pour transformer définitivement « Sarte » en « Sarthe ». Mais il semble que ce soit au cours du XVIIIème siècle que l’orthographe du nom de la rivière mute et s’oriente lors vers sa forme actuelle. Des documents du XVIIème siècle indiquent également « Sarthe » ; c’est le cas par exemple de la carte de Cloppenbourg (1630) sur le comté du Perche. Ou encore le pouillé de l’archevêché de Tours1 qui cite en 1648 «  la cure de Sainct Benoist sur Sarthe ».

Au XVIème siècle également on retrouve « Sarthe ». Ainsi Sébastien Münster2 dans sa description du pays du Maine évoque la présence des Cénomans et la fondation du Mans. Dans ce récit légendaire, il évoque Leman, fils de Paris, qui réédifie une ville qu’il nomme Le Mans et qu’il donne le nom de « Sarthe » à la rivière qui l’avoisine.

Même aux époques plus lointaines, il y a des exemples avec la lettre « h » telle la charte de fondation de l’abbaye de Perseigne au milieu du XIIème siècle (« In dedicatione autem ecclesie et in dotis nomine dedi eis apud Rolers prata que sunt a fosseio sicut rivulus qui vocatur Rugemmar circuit usquequo recipitur in Sartham et eamdem Sartham in proprio dominio ad piscandum, ab illo scilicet loco quo predictus rivulus in ea descendit usque ad predictum fosseium et sicut dicta prata extenduntur in longum et latum. »3).

1Pouillé général contenant les bénéfices de l'archevêché de Tours, Paris, 1648, p. 52-53

2MÜNSTER (Sébastien), La cosmographie universelle de toute le Monde, Paris, 1575, p. 45

3FLEURY (Gabriel), Cartulaire de l’abbaye cistercienne de Perseigne, Mamers 1880, p. 3-4

Carte de Cloppenbourg (1630)

Carte de Cloppenbourg (1630)

Extrait des poèmes de Théodulfe d'Orléans (IXème siècle)

Extrait des poèmes de Théodulfe d'Orléans (IXème siècle)

Extrait du testament de Jean de Lexille (XIVème siècle)

Extrait du testament de Jean de Lexille (XIVème siècle)

Alors, quelle est l’origine du nom « Sarthe » ?

L’hydronyme « Sarthe » s’appuie sur une racine très ancienne, peut-être pré-celtique ; c’est sans doute la même étymologie que « Saar » en Allemagne ou encore que «Serre» dans les Ardennes ou même « Cère » qui naît dans le Cantal. L’origine en serait « sar/ser/sor » voulant dire « cours d’eau », « écoulement ».

Notons que la source à Somsarthe peut se traduire par point haut (source) de la Sarthe.

Une rivière vivante

Il ne s’agit pas ici de montrer tous les éléments qui se sont développés sur et autour du cours d’eau, mais juste d’évoquer l’importance de la rivière dans les activités humaines au travers des âges.

 

La vallée de la Sarthe est fréquentée depuis longtemps puisque diverses découvertes archéologiques indiquent une présence très ancienne. Les interventions de l’INRAP, par exemple, ont ainsi révélé un site moustérien à Fontenay-sur-Vègre (72) qui a été placé entre -60 000 et – 50 000 ans1. Les fouilles menées par Paléotime à la fin de l’année 2012 au Bois de Sirion sur la commune d’Auvers-Le-Hamon (72) proposent une occupation dans la même fourchette chronologique2. Sur la commune du Mans, la découverte du site de «Château-Gaillard », en limite avec Rouillon, a livré du matériel lithique qui pourrait remonter à environ 75 000 ans3. Mais d’autres pièces archéologiques trouvées dans la région de Sablé (72) en prospection permettent de remonter plus loin dans le temps vers -400 000/-300 000.

On verra également s’installer dans les zones très proches de la rivière des ouvrages fortifiés à l’époque protohistorique : Narbonne à Saint-Léonard-des-Bois ou le Chatelier à Saint-Jean-d’Assé.

13 Voivres

Outil paléolithique (Voivres Lès Le Mans)

Outil paléolithique (Voivres Lès Le Mans)

Outil paléolithique (Voivres Lès Le Mans)

Outil paléolithique (Voivres Lès Le Mans)

Outil paléolithique (Voivres Lès Le Mans)

Outil paléolithique (Voivres Lès Le Mans)

La butte de Narbonne à Saint Léonard des Bois

La butte de Narbonne à Saint Léonard des Bois

Le rempart protohistorique de la butte de Narbonne à Saint Léonard des Bois

Le rempart protohistorique de la butte de Narbonne à Saint Léonard des Bois

On ne connaît quasiment rien de l’utilisation de la rivière à l’époque antique, si ce n’est d’hypothétiques passages. Au moyen-âge, la Sarthe permet de contrôler la circulation et on verra des fortifications s’élever aux points stratégiques pour surveiller les divers mouvements. On citera par exemple les châteaux de Fresnay, Beaumont, La Guierche, La Suze, Malicorne ou encore Sablé. Certains seigneurs disposent des droits de pêche sur la rivière et ce jusqu’à l’abolition des privilèges en 1790. On sait aussi par les les miracula d’Ermentaire (IXème siècle) qu’une femme, accompagnant son fils malade, prend le bateau près du Mans pour se rendre en pèlerinage à Saint-Philbert de Grandlieu ; descendant la Sarthe et la Loire, son navire vient aborder au portus de Rezé.

Le site du château de Fresnay sur Sarthe (Xème siècle)

Le site du château de Fresnay sur Sarthe (Xème siècle)

Le site du château de Beaumont sur Sarthe (XIème siècle)

Le site du château de Beaumont sur Sarthe (XIème siècle)

La Suze sur Sarthe en 1695 (implantation d'un château début XIème siècle)

La Suze sur Sarthe en 1695 (implantation d'un château début XIème siècle)

Le site castral de Sablé sur Sarthe (Xème siècle)

Le site castral de Sablé sur Sarthe (Xème siècle)

Ensuite la rivière perd sa fonction stratégique mais reste toujours difficile à franchir. Les ponts sont rares et on passe soit à gué soit par des bacs. De plus la plupart des bateaux de marchandises ne remontent que jusqu’à Malicorne ; là il faut soit continuer le transport par route ou soit décharger pour recharger sur de plus petites embarcations. Jusqu’à la fin du XIXème siècle, entre Le Mans et Sablé seule la ville de La Suze permet de passer le cours d’eau sur un pont. On voit, avec les progrès de la Révolution industrielle, certaines communes faire des demandes pour pourvoir franchir la rivière en sûreté. C’est le cas à Spay à partir de 1880, date à laquelle la commune émet une demande ; elle fut renouvelée lors de la séance du conseil municipal le 14 décembre 1886 et l’agent voyer émet un avis favorable. Dès lors, la construction d’un pont à voie unique pourra commencer. Elle est confiée à l’entreprise Fonteix, rue du Marché aux Porcs au Mans. Les parties métalliques seront sous-traitées à la société Baudet, Donon et Cie de Paris. Les travaux s’achèvent en 1890.

Le site du château de Malicorne et son barrage (dessin de 1695)

Le site du château de Malicorne et son barrage (dessin de 1695)

Le vieux pont de la Suze à la fin du XIXème siècle

Le vieux pont de la Suze à la fin du XIXème siècle

Plan du pont de Spay (fin XIXème siècle)

Plan du pont de Spay (fin XIXème siècle)

On circule depuis longtemps sur la rivière. Mais l’installation des moulins sur la rivière va perturber la circulation à cause de la mise en place des barrages. Vers le milieu du XIXème siècle, des canaux permettront de contourner les difficultés au sud du Mans. Par exemple en 1846 est lancée l’idée d’une construction, entre Fillé et Roézé, qui permettra de contourner les moulins de Fillé et de la Beunêche. Les travaux sont achevés en 1860. Mais le train connaît sa phase de développement et la navigation va commencer à décliner.

L'entrée du canal à Fillé (carte postale ancienne)

L'entrée du canal à Fillé (carte postale ancienne)

Le canal à Roézé

Le canal à Roézé

Canal de Spay (cadastre ancien)

Canal de Spay (cadastre ancien)

L’eau de la rivière sert aussi pour certaines industries comme les tanneries ou encore pour le rouissage du chanvre. Cela n’est pas sans certains désagréments. Ainsi Victor Eugène Ardouin Dumazet (1852-1940), journaliste qui rédige des guides touristiques (Voyage en France), rapporte en 1898 : « Le rouissage est une cause puissante d’insalubrité. Pendant deux mois, la Sarthe et ses affluents roulent une eau noire et nauséabonde ; l’infection est telle que, dans la traversée de la ville du Mans, les quais sont désertés par les promeneurs. Depuis la fin d’août jusqu’au milieu de septembre, le rouissage est en pleine activité, mais l’infection des eaux se prolonge bien souvent pendant les premiers jours d’octobre ».

On pourrait aussi citer les marbreries de Solesmes qui vont connaître un développement important au cours du XIXème siècle. On utilise la rivière à la fois pour la force hydraulique mais aussi pour le transport des blocs de marbre.

Rouissage du chanvre à Juillé

Rouissage du chanvre à Juillé

Moulin à chanvre au Mans

Moulin à chanvre au Mans

Marbrerie de Solesmes

Marbrerie de Solesmes

Tanneries de La Suze

Tanneries de La Suze

Grands moulins de Saint Georges au Mans

Grands moulins de Saint Georges au Mans

Au cours du XXème siècle, le tourisme se développe également. Les Alpes Mancelles commencent à accueillir les touristes. Au Mans, les bains Boulay proposent de se baigner dans la rivière. Les plages apparaissent comme à Noyen par exemple. A Fillé, le moulin devient une zone attractive.

La plage de Fresnay sur Sarthe

La plage de Fresnay sur Sarthe

La plage de Noyen sur Sarthe

La plage de Noyen sur Sarthe

L'hôtel pour touristes à Saint Léonard des Bois

L'hôtel pour touristes à Saint Léonard des Bois

L'hôtel pour touristes à Saint Léonard des Bois

L'hôtel pour touristes à Saint Léonard des Bois

La Sarthe à Moulins le Carbonnel

La Sarthe à Moulins le Carbonnel

La Sarthe à Sougé le Ganelon

La Sarthe à Sougé le Ganelon

La Sarthe à Saint Aubin de Locquenay

La Sarthe à Saint Aubin de Locquenay

La Sarthe à Vivoin

La Sarthe à Vivoin

La Sarthe à Saint Marceau

La Sarthe à Saint Marceau

La Sarthe à Teillé

La Sarthe à Teillé

La Sarthe à Montbizot

La Sarthe à Montbizot

La Sarthe à Sainte Jamme sur Sarthe

La Sarthe à Sainte Jamme sur Sarthe

La Sarthe à Chemiré le Gaudin

La Sarthe à Chemiré le Gaudin

La Sarthe à Fercé sur Sarthe

La Sarthe à Fercé sur Sarthe

La Sarthe à Dureil

La Sarthe à Dureil

La Sarthe à Avoise

La Sarthe à Avoise

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31 mars 2023 5 31 /03 /mars /2023 21:18

Une querelle entre les moines de la Couture et les chanoines de Saint Pierre la Cour est à l’origine d’un texte (vers 1135) qui évoque une « foresta » sur Roézé. C’est la cour épiscopale qui intervient pour régler le problème.

 

Moi, Hugues, par la grâce de Dieu, métropolitain de Tours, et notre vénérable frère Guy, lui aussi par la grâce de Dieu évêque du Mans, et Guillaume abbé de Saint Pierre de La Couture, à tous les fidèles présents et à venir, salut ; nous attestons la vérité d’une cause que nous avons examinée.

Que votre sagesse sache avec certitude que l’église de Saint Pierre la Cour, par donation d’Hugues David fondateur de cette église et par abondante contribution des autres seigneurs du Mans et enfin par donation du comte Hélie, d’heureuse mémoire, a reçu et possédée longtemps les dîmes de sa forêt et sur la glandée et sur la moisson.

Comme cette forêt était devenue terre labourable depuis un long temps, les chanoines de Saint Pierre la Cour firent dans cette même forêt deux églises [Louplande et Voivres] et ils attribuèrent séparément à chacune sa paroisse ; et ils les occupèrent longtemps paisiblement.

Mais après un long temps, les moines de Saint-Pierre de Couture s'élevèrent contre les chanoines, disant que dans une certaine partie de la forêt, à savoir, dans celle qui est entre la rivière Orne et Roézé, ils avaient une dîme sur la glandée, et donc, quand cette partie de la forêt a été transformée en terre arable, ils ont pris le dixième de la moisson, car ils avaient des glands, seulement de ceux qui contredisaient les chanoines. Cela affirmé, Guillaume, doyen de Saint-Pierre-la-Cour, et les chanoines vinrent à l'évêque Guy, protestant de leur dîme, que les moines avaient ainsi envahie. Quand l'évêque entendit cela, il appela Guillaume, abbé de Saint-Pierre de la Couture, et les moines, et il donna le jour aux moines et aux chanoines qui l’acceptèrent. Le jour de l'échéance, ils vinrent tous les deux, et en présence du seigneur évêque, ils exposèrent leurs raisons.

Quand ils ont appris cela, la cour de l'évêque a décidé que les chanoines devraient être investis de la dîme qu'ils réclamaient, et ensuite, sur les chanoines, les moines auraient la justice. Ce jugement, les moines l'acceptèrent sans contradiction, et au lieu de l'investiture elle-même, ils remirent en gage aux chanoines le pallium.

Les ayant donc investis, vinrent les avocats de la paix et de la concorde entre les moines et les chanoines, et d'un conseil modéré, en notre présence et au chapitre de Saint Pierre de la Couture de notre main et de celle de l’évêque Guy, par l’abbé Guillaume et par le doyen Guillaume, l’accord a été signé et ainsi la querelle a été terminée et apaisée.

De sorte que désormais les moines aient la dîme et la paroisse de la terre de l’Auneau entre Roézé et la rivière de l’Orne, et la moitié des dîmes, offrandes, prémices et toute la rente paroissiale de la terre de Raymond, et de la terre des moines d’Oizé et de la terre des chanoines de Beaulieu et de la terre de Renaud du Breil.

Et que les chanoines aient l’autre moitié, et toutes les dîmes de l’autre forêt et toutes les rentes paroissiales en quelque lieu qu’il y ait forêt féodale et qui soit devenue terre labourable.

Et si les paroissiens des terres communes se rendent à l’église de Voivres, que les moines aient la moitié de tout leur revenu paroissial ; si au contraire ils se rendent aux églises des moines, que les chanoines aient là la moitié de tout le revenu paroissial de ces gens des communes.

 


 

Cartulaire de l’abbaye de la Couture au Mans1 et cartulaire de la collégiale Saint Pierre de la Cour2

 

1Cartulaire des abbayes de Saint Pierre de la Couture et de Saint Pierre de Solesmes, Le Mans, 1881

2Menjot d’Elbenne (Vicomte) et Denis (L. J.), Cartulaire du chapitre royal de Saint Pierre de la Cour du Mans, Le Mans, 1907

 

ACCORD ENTRE LES MOINES DE LA COUTURE ET LES CHANOINES DE  SAINT-PIERRE-LA-COUR SUR UNE TERRE DE ROÉZÉ (vers 1135)
ACCORD ENTRE LES MOINES DE LA COUTURE ET LES CHANOINES DE  SAINT-PIERRE-LA-COUR SUR UNE TERRE DE ROÉZÉ (vers 1135)
ACCORD ENTRE LES MOINES DE LA COUTURE ET LES CHANOINES DE  SAINT-PIERRE-LA-COUR SUR UNE TERRE DE ROÉZÉ (vers 1135)

Les personnages cités dans les documents

Hugues : archevêque de Tours (1134-1146). Ce serait un membre de la famille des seigneurs de La Ferté-Arnaud (La Ferté-Vidame, Eure-et-Loir) comme semble l’indiquer le cartulaire de Saint Père de Chartres dans une confirmation de don datée des environs de 1136. Il succède à Hildebert de Lavardin, évêque du Mans et archevêque de Tours, mort en décembre 1134.

Gui : évêque du Mans (1126-1135) qui serait originaire de Bretagne (région de Ploërmel). Il est appelé Guy d’Étampes dans certaines publications. Il paraît avoir été assez proche du pouvoir normand puisqu’il fut à un moment de sa vie écolâtre de Salisbury, chanoine de Lincoln et archidiacre de Rouen. Il fait partie de ces évêques manceaux du XIIème siècle dont la renommée attire les étudiants. Il célébrera à la cathédrale du Mans le mariage entre Geoffroy V Plantagenêt et Mathilde fille du roi d’Angleterre Henri Ier. Il baptisera également en 1134 leur fils Henri, futur roi d’Angleterre. C’est aussi pendant son épiscopat qu’un grand incendie va ravager Le Mans en 1134. Il décède en 1135 (1136 selon Orderic Vital) et c’est Hugues de Saint-Calais qui devient alors évêque du Mans.

Guillaume, abbé de Saint Pierre de la Couture : Les auteurs de la transcription du cartulaire de la Couture se demandent s’il n’y a pas une erreur quant à ce nom puisque l’abbé à l’époque serait Foulques.

Hugues David : Les actes des cartulaires de la Couture et de Saint-Pierre-la-Cour font référence à ce Hugues dit aussi « filius David » ; à la fin du Xème siècle il a fait divers dons aux deux communautés religieuses. Il est d’ailleurs fort probable que certains éléments de la collégiale encore visibles aujourd’hui remontent à l’époque du comte Hugues II. Les hugonides étaient proches des Capétiens, mais ils changent de camp ; les Capétiens se tourneront alors vers les Angevins pour leurs confier le Maine. Cependant, les hugonides ne se laisseront pas faire.

Hélie : Hélie, de par sa mère, descend des comtes du Maine ; il avait racheté vers 1092 le comté du Maine à un de ses cousins, Hugues V. C’était un farouche adversaire des Normands allant jusqu’à faire prisonnier l’évêque Hoël, fidèle allié des Normands, ce qui entraîna à l’époque un certain vent de révolte dans le Maine. On voit clairement que le comté est partagé entre suivre les partisans des Angevins ou ceux des Normands, d’autant que les intérêts des uns deviennent parfois les intérêts des autres selon que les seigneurs fassent ou défassent leurs alliances. Mais les premières années d’Hélie en tant que comte du Maine sont compliquées. Jusqu’à l’extrême fin du XIème siècle, les troupes normandes vont agir dans le Maine où elles reprennent plusieurs châteaux ; Orderic Vital allant même jusqu’à dire que le comte Hélie fut fait prisonnier. En 1100, Guillaume Le Roux, roi d’Angleterre, meurt. Hélie va alors pouvoir s’imposer non sans devoir encore se positionner subtilement dans un univers seigneurial où les retournements d’alliance sont fréquents. Cependant la première décennie du XIIème siècle sera pour Hélie celle de la stabilisation, se rapprochant de l’Angleterre mais également de l’Anjou. Après les guerres était venu le temps de la diplomatie.

Guillaume, doyen de Saint-Pierre-la-Cour : C’est à priori la seule mention de ce religieux.

Moines d’Oizé : Le prieuré d’Oizé est doté par Hélie de La Flèche et dépendait de Vézelay. Les religieux avaient le fief des Buretières (actuellement sur la commune de Voivres) donc de l’autre côté du ruisseau de l’Orne. Le prieuré, du moins pendant cette période, reste très proche du pouvoir angevin.

Chanoines de Beaulieu : L’abbaye de Beaulieu a été fondée au début de XIIème siècle, soit quelques années avant la rédaction de l’accord qui nous intéresse ici. Elle se situait au Mans sur la rive droite de la Sarthe, dans l’ancienne paroisse de la Madeleine. A Roézé, l’abbaye possède Saint-Fraimbault qu’elle aurait obtenu sans doute dès le XIIème siècle par Foulques d’Anjou.

Renaud du Breil : Le toponyme est tellement fréquent qu’il est difficile de localiser cette terre en l’absence d’éléments historiques restés dans les écrits. Selon Menjot d’Elbenne, au XVème siècle, il existait un Jean Bellenger, seigneur du Breil à Saint Benoît sur Sarthe. Pour les auteurs du début du XXème siècle, il s’agirait d’un fief à Brûlon. On trouve également une charte du XIIème siècle où est cité un Renaud du Breil dans un acte concernant l’abbaye de Tironneau.

 

Le contexte

On peut essayer de comprendre le conflit entre les deux entités religieuses. D’un côté nous avons l’abbaye de la Couture et de l’autre les religieux de la collégiale Saint Pierre la Cour. Cette dernière est sous le contrôle direct du comte du Maine et, pour l’époque qui nous intéresse ici, donc de Geoffroy V Plantagenêt (1113-1151). Quant à l’abbaye de la Couture, elle est alors à son apogée : plusieurs dizaines de milliers d’hectares de terres, une cinquantaine de prieurés et un abbé aussi puissant que le comte du Maine.

Geoffroy V le Bel

Geoffroy V le Bel

Si l’on en croit les écrits de Dom Piolin dans son œuvre conséquente « Histoire de l’Église du Mans »1, la période est assez tendue. Le Maine est passé aux mains des Plantagenêts en 1110 lors du mariage entre Foulques V, comte d’Anjou, et Erembourg du Maine héritière du comté. Foulques V meurt en 1129 et c’est le jeune Geoffroy V le Bel qui hérite du comté. Il doit alors s’affirmer face à des seigneurs qui voient en ce jeune comte un élément faible qui devrait être facile à attaquer. On verra d’ailleurs la famille de Sablé, liée par mariage à celle de La Suze, prendre position contre les Plantagenêts.

Piolin nous dit que Foulques avait confisqué des terres religieuses pour les redistribuer à ses fidèles. Il semble que ces « confiscations » soient en lien avec des défrichements entre Le Mans et La Suze dans ce qui se nommait autrefois les bois des Teillais. Mais on sait par diverses sources, dont l’archéologie, que ces espaces étaient déjà habités. C’est le cas du secteur des Randonnays aux confins des communes de Voivres-Lès-Le Mans, Etival-Lès-Le Mans et Allonnes. Certains lieux à la limite des deux paroisses ont été jusqu’à la Révolution en « tournes », c’est à dire qu’ils relevaient une année d’une paroisse et l’année suivante de l’autre. Il paraît aussi dans ce document que ces donations comtales ont été suivies d’une mise en valeur des terres pour justement accroître les revenus des établissements religieux.

1Dom Paul Piolin, Histoire de l’Église du Mans, T. IV, p. 2, Paris, 1858

La Tournerie, carte de Cassini (1765)

La Tournerie, carte de Cassini (1765)

L’abbaye de la Couture avait obtenu des terres sur Roézé dans le second quart du XIème siècle lorsque le seigneur Lodon fit don de biens aux religieux entre la Sarthe et l’Orne Champenoise. Quelques chartes dans le cartulaire de la même abbaye nous rapportent d’autres mouvements de terres dans la région de La Suze. Ainsi en 1142, une courte charte fait mention d’un contentieux avec Payen de Clairvaux toujours à propos d’une « foresta ».

Qu’est ce qu’une « foresta » ?

Il serait très réducteur de traduire ce mot latin médiéval par « forêt », du moins par l’image que nous renvoie ce terme. Il s’agit plutôt d’une unité juridique qui peut inclure des forêts, des landes, des bois, des cultures, des villages, etc. D’ailleurs, elle est traversée par chemin appelé « viam Caenomansem » dans une charte de l’évêque d’Angers du début du XIIème siècle1. Il ne faut pas non plus le prendre comme un lieu précis mais comme un espace géographique relativement étendu. Les environs nous révèlent plusieurs toponymes en relations avec ce type de paysage : La Forêt (Etival Lès Le Mans, Fillé sur Sarthe, Roézé sur Sarthe), les Buissonnières (Etival Lès Le Mans), les Bois (Roézé sur Sarthe, Louplande), la Touche (Roézé sur Sarthe, Louplande), les Landes (Allonnes, Spay, Saint Georges du Bois), etc.

1Josèphe Chartrou, L’Anjou de 1109 à 1151, Presses Universitaires de France, Paris, 1928, p. 356

A l’origine, il s’agit d’un système qui apparaît vers le VIIème siècle et qui se développe ensuite à l’époque carolingienne. Les territoires concernés sont sortis du droit commun1. Puis, lorsque le pouvoir carolingien décline et que les forestae ont perdu leur fonction première, les comtes vont utiliser cette réserve foncière pour les redistribuer afin de renforcer leurs réseaux de pouvoir. C’est ce sont que l’on voit par exemple à propos du domaine des Randonnays. D’ailleurs, les indices archéologiques sur cette zone montrent clairement qu’à l’époque antique l’occupation était autre.

Le texte est assez clair puisqu’il évoque un territoire transformé en terre labourable et sur lequel les religieux perçoivent des droits. A la lecture de divers documents médiévaux, on a le sentiment d’avoir un espace qui était aux mains des comtes du Maine et qui sera concédé à des abbayes. En tout cas, il semble que les dons faits à Saint Pierre la Cour soient simplement un moyen pour le comte de faire fonctionner en autonomie sa collégiale.

La confirmation d’une charte de Foulques concernant les Randonnays (Voivres) précise justement les attributions de ce territoire. On y apprend ainsi qu’il y fut fait des prés, que les moines avaient droit de panage ou glandée dans les bois pour leurs porcs ainsi que le droit de prélever du bois pour édifier leurs bâtiments.

 

Mais le diplôme du comte Hugues du Maine daté de 10142, soit un siècle antérieur aux documents ci-dessus évoqués, permet d’affiner le vocabulaire. Il y est bien spécifié que c’était une terre relevant directement du comte puisqu’on trouve l’expression latine « nostri juris terram ». L’utilisation du terme « saltus » renvoie plutôt à un paysage de landes, de terres non cultivées en friche ; le document dit que ce saltus entoure le lieu de Vedobris que l’on fait correspondre aujourd’hui à Voivres. Il paraît donc évident que les religieux reçoivent une terre pour la mettre en valeur ; il faut dire que le prieuré Saint Victeur avait été doté quelque temps auparavant de vignes et des moulins situés au Mans ou à proximité immédiate. Mais une indication dans ce texte permet de mieux comprendre le flou qui réside dans ce type de paysage puisque la phrase « que dicitur Vedobris, sicut eam saltus undique circuncludit, cum omnibus que in ea sunt, id est ecclesia, molendino, pratis, vivaiiis » indique que dans le saltus sont également présents une église (ou chapelle), un moulin, des prés et des viviers. Il est donc possible que cette occupation corresponde à une implantation au moins carolingienne voire même mérovingienne. Il n’est pas impossible d’ailleurs que le Vedobris du diplôme de 1014 soit aussi le Vodebris rencontré dans la Vie de Saint Julien.

1Jean-Claude Meuret, Paroisses sur la limite orientale de la Bretagne aux XIe-XIIe siècles : évolution du réseau en contexte frontalier, dans La paroisse, communauté et territoire, p. 291-367, PUR, Rennes, 2013

2Bertrand de Broussillon, Cartulaire de Saint Victeur au Mans prieuré de l’abbaye du Mont Saint Michel (994-1400), Paris, 1895, p. 5

Les Randonnays, Voivres, 1948

Les Randonnays, Voivres, 1948

La Forêt, Roézé, cadastre 1843

La Forêt, Roézé, cadastre 1843

La Forêt, Roézé, traces parcellaires d'occupation médiévale

La Forêt, Roézé, traces parcellaires d'occupation médiévale

ACCORD ENTRE LES MOINES DE LA COUTURE ET LES CHANOINES DE  SAINT-PIERRE-LA-COUR SUR UNE TERRE DE ROÉZÉ (vers 1135)

On peut aussi voir dans ce texte la difficulté à délimiter précisément les paroisses, et donc les droits y afférant1. Il en restera, jusqu’à l’établissement des communes avec des limites précises dans un plan cadastral, des traces avec des zones en tourne. On trouvera d’ailleurs un lieu-dit la Tournerie sur Voivres.

On peut voir sur le plan cadastral de XIXème siècle, les traces laissées par cet aménagement. Une zone elliptique est bordé à l’ouest par le lieu-dit « La Forêt » et à l’est par celui des « Bretelleries ». Il semble que cette zone ait été coupée en deux à un moment. Peut-être qu’au départ seul le lieu de la Forêt existait et qu’ensuite on ait installé une autre famille sur le lieu des Bretelleries ; mais cela n’est qu’une hypothèse en l’absence de sources pour travailler plus précisément.

Il faut aussi noter que les quatre toponymes « Forêt » sont en limite de paroisse. Celui d’Etival borde Voivres et Louplande, celui de Fillé borde Voivres, celui de Louplande borde aussi Voivres ainsi que celui de Roézé

1Michel Brand’honneur, Manoirs et châteaux dans le comté de Rennes, Habitat à motte et société chevaleresque (XIe au XIIIe siècles), PUR, Rennes, 2001

Les dotations religieuses au XIème et XIIème siècles

Comme nous l’avons dit plus haut, ces deux communautés religieuses vont être dotées de domaines. On sait que l’abbaye de la Couture a reçu vers 1030-1050 des terres autour de Roézé d’un seigneur nommé Lodon mais dont on ne connaît pas l’étendue du domaine1. En 1185, les religieux recevront aussi des dîmes sur la Beunêche.

Quant à Saint Pierre la Cour, elle avait donc reçu deux « ecclesias » bien avant la querelle évoquée dans ce document. La fondation de ces deux églises n’est sans doute à prendre au sens premier de ce terme. Il s’agit plutôt de l’acquisition de droits sur la paroisse2.

 

D’autres donations comtales sont connues dans ce secteur. Au début du XIème siècle, le comte du Maine Hugues donne au Mont Saint Michel de la terre entre Etival Lès Le Mans et Voivres.

Ce secteur entre Le Mans et La Suze a fait l’objet de plusieurs autres donations. Par exemple, Foulques d’Anjou avait fait don aux religieux de Savigny (50), sans doute vers 1116/11203, de la terre des Randonnays4 (commune de Voivres-Lès-Le Mans) située à cinq kilomètres au nord-est de la Forêt ; la terre passe ensuite à l’abbaye cistercienne de la Boissière (49) dépendante de Savigny. Mais cette implantation ne pu se développer et les moines iront ensuite à Denezé sous Le Lude (49). C’est peut-être de cette époque que date le droit de novales (droit sur les terres nouvellement défrichées) attribuée aux curés de la paroisse de Voivres sur la terre des Randonnays.

1Cartulaire des abbayes de Saint Pierre de la Couture et de Saint Pierre de Solesmes, Le Mans, 1881, p. 17 à 19

2Éric Van Torhoudt, La formation des territoires paroissiaux en Normandie occidentale aux XIe-XIIIe siècles, dans La paroisse, communauté et territoire, p. 235-257, PUR, Rennes, 2013

3Jaap van Moolenbroek,  Vital, l'ermite, prédicateur itinérant, fondateur de l'abbaye normande de Savigny, Revue de l'Avranchin et du Pays de Granville, t. 68, no 346,‎ 1991, p. 203

4Noël-Yves Tonnerre, La place des abbayes cisterciennes dans l’histoire de l’Anjou, Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, 120-3, 2013, p. 172-187

Donations

Donations

Eglise de Roézé (datation proposée : 975/1025)

Eglise de Roézé (datation proposée : 975/1025)

Prieuré des moines de la Couture à Roézé.

Prieuré des moines de la Couture à Roézé.

Voivres, XIème siècle

Voivres, XIème siècle

Etival Lès Le Mans, IXè/Xè s.

Etival Lès Le Mans, IXè/Xè s.

Les problèmes de perception des dîmes et de patronage sur les paroisses sont un sujet classique qui revient souvent au cours du XIIème siècle. La justice épiscopale s’appuie alors sur une administration développée et organisée pour s’occuper de ces questions. On peut sans doute également voir dans cet accord un exemple du pragmatisme épiscopal manceau qui vient régler un conflit entre une institution religieuse très proche des Plantagenêts et une abbaye de la Couture au sommet de sa puissance.

 

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18 février 2023 6 18 /02 /février /2023 22:23

La lande de Pierre Aube à Fillé sur Sarthe

 

Il existe sur la route qui va de Fillé à Voivres un lieu-dit nommé « Pierre Aube » qui correspond à une zone boisée entre la route de Voivres et la route des Vignes. Il existe d’autres lieux nommés Pierre Aube, ou ses dérivés, en France : Saint Germain des Champs (Yonne), Landéan (Ille-et-Villaine), Adervielle Pouchergues (Hautes Pyrénées), Lamayou (Pyrénées Atlantiques), Arrigas (Gard), etc.

Photographie aérienne (1948)

Photographie aérienne (1948)

Carte de Jaillot (1706)

Carte de Jaillot (1706)

Carte de Cassini (1765)

Carte de Cassini (1765)

La lande de Pierre Aube à Fillé sur Sarthe
Plan du début du XIXè siècle. Les landes sont visibles à droite.

Plan du début du XIXè siècle. Les landes sont visibles à droite.

Les plans anciens et les différents cadastres du XIXème siècle n’indiquent aucune ferme portant ce nom ; cependant un bordage (Mathurin Brincoustu bordager vers les années 1670) est signalé dans quelques actes notariés du XVIIème siècle sans qu’il soit possible de le localiser. Le lieu désigne une lande dépendant avant la Révolution de la terre du Gros Chesnay dont des parcelles sont louées à divers fermiers. Il y est fait mention également d’un lieu de paissage c’est à dire une zone où viennent paître les bêtes. Les actes notariés précisent que l’on va « en la lande Pierre Aube ».

Acte notarié de 1657

Acte notarié de 1657

Cadastre 1844

Cadastre 1844

Cadastre 1844

Cadastre 1844

Cadastre 1844

Cadastre 1844

Dans la Sarthe, de nombreux lieux-dits portent le nom de « Pierre ». Pour la région de Fillé, citons la présence de ce toponyme sur Cérans-Foulletourte, Guécélard, Mézeray, Spay, etc. Certains désignent la présence de monuments mégalithiques remontant au néolithique (ex : Pierre Couverte à Parigné le Pôlin). On peut donc raisonnablement penser que le nom « Pierre Aube » (c'est-à-dire la pierre blanche) est le témoin d’un monument préhistorique présent sur la commune de Fillé.

Cette idée est confortée par des découvertes archéologiques faites dans les environs. On a trouvé dans quelques champs de Fillé des objets préhistoriques datant du néolithique (entre 6000 et 2000 avant Jésus Christ). La vallée de la Sarthe a toujours été un axe de circulation et il est logique de ramasser des objets de cette époque sur la commune.

Parmi ces découvertes, un objet se distingue. Il s’agit d’une meule trouvée près du Clos Colin. Elle permettait à une famille de produire de la farine à partir de céréales. C’est en quelque sorte l’ancêtre du moulin de Fillé.

Outils préhistoriques découverts sur Fillé

Outils préhistoriques découverts sur Fillé

Outil préhistorique, Fillé

Outil préhistorique, Fillé

Meule à moudre

Meule à moudre

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9 octobre 2022 7 09 /10 /octobre /2022 15:37

DES HOMMES PRÉHISTORIQUES À VOIVRES

Des découvertes archéologiques montrent que la région de La Suze est occupée depuis fort longtemps.

Sur les hauteurs, là où le plateau domine l’ancienne vallée de la Sarthe, quelques outils trahissent la présence d’une occupation remontant au paléolithique moyen. L’ensemble, composé de quelques racloirs ou déchets atypiques, correspond à une industrie moustérienne (- 35 000 à - 250 000 ans).

Les matériaux employés sont caractéristiques de cette période ; le silex, mais aussi le grès, ont été façonnés par les hommes préhistoriques. En effet, les hommes travaillent la pierre qu’ils ont à leur disposition. On retrouve dans notre région des objets et matériaux semblables sur à Fontenay sur Vègre (Sarthe) et à Hambers (Mayenne).

 

On peut aisément imaginer l’habitat de Voivres. Selon les périodes, le climat est soit plus rude qu’aujourd’hui soit comme le notre. Ainsi, lors d’une période froide la végétation est dominée par de grandes plaines herbeuses avec peu d’arbres (sapins, bouleaux, chênes). Lorsque le climat se réchauffe, la végétation ressemble à la notre. Évidement, les espèces animales présentes varient suivant le type de climat

Sur le plateau dominant l’ancien lit de la Sarthe, un petit groupe humain néandertalien composé s’installe sur le plateau. De là, cette tribu nomade observe la vallée où passent quelques troupeaux de rennes, bisons, chevaux, aurochs, etc. Il y a bien de rares mammouths mais ils ne sont pas chassés. L’habitat est installé sur le plateau ; il s’agit de quelques huttes faites de branchages voire de peaux de bêtes.

Vraisemblablement, le site n’était pas très favorable à la chasse. La tribu quitte l’endroit pour s’installer ailleurs ne laissant derrière elle que quelques outils.

 

 

 

 

Préhistoire à Voivres Lès Le Mans (Sarthe)
Préhistoire à Voivres Lès Le Mans (Sarthe)
Préhistoire à Voivres Lès Le Mans (Sarthe)
Préhistoire à Voivres Lès Le Mans (Sarthe)
Préhistoire à Voivres Lès Le Mans (Sarthe)

Rappel de la loi : La prospection archéologique est soumise à autorisation administrative délivrée par le préfet de région. L'utilisation des détecteurs de métaux dans les parcelles qui recèlent des vestiges archéologiques est strictement interdite. Le non respect de la loi est soumis à de lourdes sanctions.

 

Code du Patrimoine :

Art. L. 531-1 – Nul ne peut effectuer sur un terrain lui appartenant ou appartenant à autrui des fouilles ou des sondages à l'effet de recherches de monuments ou d'objets pouvant intéresser la préhistoire, l'histoire, l'art ou l'archéologie, sans en avoir au préalable obtenu l'autorisation.
La demande d'autorisation doit être adressée à l'autorité administrative ; elle indique l'endroit exact, la portée générale et la durée approximative des travaux à entreprendre.
Dans le délai, fixé par voie réglementaire, qui suit cette demande et après avis de l'organisme scientifique consultatif compétent, l'autorité administrative accorde, s'il y a lieu, l'autorisation de fouiller. Elle fixe en même temps les prescriptions suivant lesquelles les recherches devront être réalisées.

Art. L. 542-1 - Nul ne peut utiliser du matériel permettant la détection d'objets métalliques, à l'effet de recherches de monuments et d'objets pouvant intéresser la préhistoire, l'histoire, l'art ou l'archéologie, sans avoir, au préalable, obtenu une autorisation administrative délivrée en fonction de la qualification du demandeur ainsi que de la nature et des modalités de la recherche.

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7 septembre 2022 3 07 /09 /septembre /2022 14:56

Des prospections archéologiques menées dans une parcelle de la commune de La Suze-sur-Sarthe ont livré des vestiges d'époque romaine. On trouve évidement ces fameuses tuiles à rebord (dites tegulae) caractéristiques d'un habitat romain. Accompagnent ces tuiles, de la céramique (céramique commune bleutée de type La Bosse, céramique sigillée, anse d'amphore, etc.), des fragments de verre dont du verre à vitre, des morceaux d'enduit peint rouge, des morceaux de scories (métallurgie mais sans doute autre activité artisanale), une monnaie (illisible), un palet en terre cuite, une dalle de calcaire (pavage ?), etc.

Palet (?), bouchon (?)

Palet (?), bouchon (?)

Verre à vitre

Verre à vitre

Mortier

Mortier

Couvercle

Couvercle

Céramique commune

Céramique commune

Enduit peint

Enduit peint

Dallage

Dallage

Tuile à rebord

Tuile à rebord

Céramique sigillée

Céramique sigillée

A priori, c'est le premier site archéologique romain découvert sur cette commune puisque la Carte Archéologique de la Gaule 72 ne signale que quelques monnaies romaines découvertes à La Suze mais sans autre précision. D’autres indices permettent de confirmer l’hypothèse de la présence d’une villa romaine. Ce n’est pas la seule dans ce secteur à l’ouest du Mans : sans doute la Tétardière à Chemiré-le-Gaudin, une ou deux autres à Souligné-Flacé, une à Voivres, une autre encore à Vallon-sur-Gée. Et on connaît grâce aux prospections archéologiques d’autres lieux de présence romaine mais sans qu’il soit possible de dire s’il s’agit bien de villas.

Plan partiel

Plan partiel

On peut, en l’état actuel des éléments à disposition, se poser la question de savoir si cette villa est l’ancêtre du bourg de La Suze où, pour l’instant aucun élément romain n’a été mis au jour. Il reste autour du site de la villa de La Suze un certain nombre de cheminements en lien avec des sites romains voisins.

Rappel de la loi : La prospection archéologique est soumise à autorisation administrative délivrée par le préfet de région. L'utilisation des détecteurs de métaux dans les parcelles qui recèlent des vestiges archéologiques est strictement interdite. Le non respect de la loi est soumis à de lourdes sanctions.

 

Code du Patrimoine :

Art. L. 531-1 – Nul ne peut effectuer sur un terrain lui appartenant ou appartenant à autrui des fouilles ou des sondages à l'effet de recherches de monuments ou d'objets pouvant intéresser la préhistoire, l'histoire, l'art ou l'archéologie, sans en avoir au préalable obtenu l'autorisation.
La demande d'autorisation doit être adressée à l'autorité administrative ; elle indique l'endroit exact, la portée générale et la durée approximative des travaux à entreprendre.
Dans le délai, fixé par voie réglementaire, qui suit cette demande et après avis de l'organisme scientifique consultatif compétent, l'autorité administrative accorde, s'il y a lieu, l'autorisation de fouiller. Elle fixe en même temps les prescriptions suivant lesquelles les recherches devront être réalisées.

Art. L. 542-1 - Nul ne peut utiliser du matériel permettant la détection d'objets métalliques, à l'effet de recherches de monuments et d'objets pouvant intéresser la préhistoire, l'histoire, l'art ou l'archéologie, sans avoir, au préalable, obtenu une autorisation administrative délivrée en fonction de la qualification du demandeur ainsi que de la nature et des modalités de la recherche.

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29 août 2022 1 29 /08 /août /2022 14:57

5. Les Cénomans de Cisalpine

 

Il existe un autre peuple nommé « Cénomans » et qui vivait dans la plaine du Pô. Les écrits ne mentionnent aucun lien avec les Cénomans de l’Ouest de la France. Mais la présence d’autres peuples gaulois en Cisalpine, dont par exemple les Vénètes, laisse à penser qu’il pourrait bien s’agir d’une même population.

L’historien grec Polybe (IIème s. av. J.-C.) dans ses Histoires (livre II) évoque les Cénomans qui s’installent au bord du Pô. Ils font partie d’un mouvement plus général de Gaulois qui se déplacent vers le Nord de l’Italie actuelle. On y apprend ainsi que les Cénomans s’allièrent aux Romains pour intervenir contre l’arrivée des Gésates, ou encore pour protéger les Romains lors d’une expédition qui avait mal tourné.

Selon l’auteur latin Tite-Live (v. 60 av. J.-C.- 17 ap. J.-C.), une partie des Cénomans aurait migré vers le nord de l’Italie actuelle dans la plaine du Pô en Gaule Cisalpine (fin du Vème s. av. J.-C. ou début du IVème s. av. J.-C.). Ces migrants cénomans auraient été conduits par un certain Etitovios qui pourrait n’être qu’un personne légendaire selon certains spécialistes (V. Kruta par exemple). Ils occupent alors un territoire dont la capitale est Brixia (Brescia qui se situe à environ 100 km à l’Est de Milan).

Tite-Live, Livre V : « XXXV. Bientôt, suivant les traces de ces premiers Gaulois, une troupe de Cénomans, sous la conduite d’Étitovius, passe les Alpes par le même défilé, avec l’aide de Bellovèse, et vient s’établir aux lieux alors occupés par les Libuens, et où sont maintenant les villes de Brixia et de Vérone. »

Au début du IIème s. av. J.-C., les Cénomans se désengagent vis à vis des Romains. Malgré une tentative de la dernière chance pour expliquer leur changement de positionnement, les Romains finissent par assimiler ces Cénomans à la culture romaine.

 

Ces migrations sont en lien avec l’opposition grandissante entre Étrusques et Romains. Il faut aussi prendre en compte les relations économiques anciennes entre le monde gaulois et le monde méditerranéen (Étrusques et Grecs par exemple). On sait que même avant les Gaulois, les populations de l’Âge du Bronze commerçaient déjà avec les Grecs.

 

Des liens :

Les Cénomans de Cisalpine

6. Conclusion

Assez rapidement après la conquête romaine, on verra les Aulerques Cénomans adopter le modèle romain même s’ils gardent certaines traditions gauloises. En fait il semble que le modèle économique romain soit en réalité une adaptation aux compétences locales et que pour les agriculteurs et artisans gaulois, l’Empire romain correspond surtout à l’extension d’une aire économique qui permet de développer les activités. Quant aux élites politiques, elles se sont elles aussi adaptées au nouveau fonctionnement. Aujourd’hui dès que vous prononcez le mot « Le Mans », vous dites en réalité « Cénomans » ; comme quoi ces Gaulois sont toujours présents.

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2 août 2022 2 02 /08 /août /2022 07:41

4. Les traces laissées par les Cénomans en Sarthe

On trouve de très nombreuses traces archéologiques des Aulerques Cénomans en Sarthe. Certains sites ont seulement été repérés par prospections pédestres ou aériennes, d’autres ont été fouillés.

 

2. Quelques sites ruraux gaulois en Sarthe

Grâce à l’archéologie aérienne, on connaît de très nombreux sites agricoles fossoyés. Mais en l’absence de fouilles, il est difficile de déterminer si ces sites sont gaulois ou gallo-romains, même si parfois il y a une certaine continuité.

Avessé (Sarthe)

Avessé (Sarthe)

Coulombiers (Sarthe)

Coulombiers (Sarthe)

Les Mées, Thoigné (Sarthe)

Les Mées, Thoigné (Sarthe)

Saint-Calais (Sarthe)

Saint-Calais (Sarthe)

Sainte-Cérotte (Sarthe)

Sainte-Cérotte (Sarthe)

On a tout de même quelques sites qui ont été fouillés lors d’aménagements (autoroutes, LGV, etc.) et qui fournissent donc des indications chronologiques quant à l’occupation de ces structures rurales agricoles.

Ainsi lors des travaux sur l’A28 au niveau de la commune de Vivoin plusieurs sites gaulois ont été fouillés, mais comme les décapages ne se font que sur l’emprise du tracé autoroutier les informations restent assez parcellaires. Cependant la synthèse de ces diverses opérations permettent de voir que nous sommes en présence de bâtiments en bois protégés par des séries de fossés et dont l’essentiel du matériel archéologique est composé de céramiques utilitaires. Le site le plus complet sur la commune de Vivoin est celui de la Petite-Nèmerie dont certains vestiges sont antérieurs à l’époque gauloise. Mais concernant l’occupation laténienne, plusieurs bâtiments semi-circulaires ou rectangulaires sur poteaux ont été mis en évidence ; là encore le matériel archéologique est essentiellement composé de céramique utilitaire. Il faut noter également la mise en évidence d’un réseau de chemins qui montre une structuration de l’espace.

Vivoin (fouilles Bruno Aubry)

Vivoin (fouilles Bruno Aubry)

Le site du Grand-Aunay à Yvré-L’Evêque est plus ambigu. Les fouilles archéologiques réalisées en 1997 ont révélé une structure quadrangulaire fossoyée couvrant une superficie d’environ 7000 m2. Situé à proximité immédiate de l’Huisne, cet enclos évoque une structure agricole classique comme on en connaît tant d’autres en Sarthe. Le lieu est au pied de la butte d’Auvours dont un des lieux-dits, sur la commune de Champagné, s’appelle « Verdun » ; or ce toponyme est typiquement gaulois. Par contre, le mobilier archéologique est plus élaboré que celui découvert dans d’autres fermes gauloises. Les archéologues ont par exemple mis au jour des fragments de moules monétaires, ce qui tendrait à prouver que cette « ferme » était aux mains d’un personnage d’une certaine importance juste avant l’implantation de l’administration romaine.

Yvré L'Evêque (Sarthe), Le Grand Aunay

Yvré L'Evêque (Sarthe), Le Grand Aunay

La nécropole des Truberdières à Ecommoy a livré une quinzaine d’enclos funéraires situés entre le VIème s. et le IVème s. av. J.-C. Mais le site contient peu de mobilier : de rares objets en métal (fibule et bracelets), de la céramique liée aux inhumations. La fouille n’a pas pu déceler de traces d’habitat dans l’emprise.

 

A Saint-Corneille, le site de la Chapelle a livré quelques traces de bâtiments agricoles de la fin de l’époque gauloise et semblant appartenir à une ferme dont la zone résidentielle était en dehors de l’emprise de l’aménagement de la LGV.

 

Le site des Nouis à Coulans-sur-Gée a permis de fouiller presque en intégralité une ferme gauloise qui paraît avoir été abandonnée au commencement du Ier s. av. J.-C. Un vaste enclos polygonal, entouré d’un talus à l’origine délimite la ferme. On y entrait du côté Est par un grand portail qui devait montrer l’importance du propriétaire. On pénètre alors dans une première cour puis ensuite dans l’enclos intérieur où se trouvaient les habitats. On a trouvé à proximité des fours pour une activité métallurgique et datés du VIIIème s. au Vème s. av. J.-C. mais sans que l’on puisse affirmer qu’il y ait un lien avec la ferme.

Coulans Sur Gée (Sarthe), fouilles Eric Mare

Coulans Sur Gée (Sarthe), fouilles Eric Mare

Lors de la construction de la LGV, toute une séquence d’occupation a été mise au jour au lieu-dit Bas de Braie à Fontenay sur Vègre. Pour ce qui nous intéresse ici, les archéologues ont repéré un cheminement gaulois, un habitat avec une maison sur poteaux ainsi qu’un grenier pour le stockage des céréales, et un enclos cultuel ou funéraire.

 

A Lavernat, le site de Vau Blanchard a été fouillé en 2006. Il s’agit d’un vaste enclos trapézoïdal d’environ 6500 m2 dont l’occupation remonte à la fin de l’époque gauloise et qui a perduré à l’époque romaine. Les vestiges sont assez rares ; à l’intérieur de l’enclos deux bâtiments sur poteaux ont été identifiés. Les archéologues ont émis l’hypothèse qu’il s’agissait là d’une modeste ferme familiale.

 

Cela montre également que les Cénomans ne vivaient pas dans des zones très boisées. Les études sur les graines mais également sur les ossements tendent à prouver que les paysages étaient très ouverts avec une gestion de territoires essentiellement composés de champs et déjà structurés par des chemins.

Rappel de la loi sur la protection du Patrimoine Archéologique :

Art. L. 542-1 - Nul ne peut utiliser du matériel permettant la détection d'objets métalliques, à l'effet de recherches de monuments et d'objets pouvant intéresser la préhistoire, l'histoire, l'art ou l'archéologie, sans avoir, au préalable, obtenu une autorisation administrative délivrée en fonction de la qualification du demandeur ainsi que de la nature et des modalités de la recherche.

A suivre : Les Cénomans et le métal

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25 juillet 2022 1 25 /07 /juillet /2022 08:17

4. Les traces laissées par les Cénomans en Sarthe

On trouve de très nombreuses traces archéologiques des Aulerques Cénomans en Sarthe. Certains sites ont seulement été repérés par prospections pédestres ou aériennes, d’autres ont été fouillés.

 

1. Les lieux gaulois complexes

a. Allonnes

Le site archéologique d’Allonnes est connu depuis le milieu du XVIIIème siècle, mais il faut attendre les années 1950 et les travaux de Pierre Térouanne pour que la présence gauloise soit attestée par les fouilles.

On connaît assez bien les vestiges de l’époque romaine avec ses temples, thermes, habitats, etc. même si le développement urbain des années 1960/1970 a sans doute rasé une bonne partie des vestiges antiques. Pour ce qui est des vestiges gaulois, ce sont les fouilles sur le site de la Forêterie (bois de Chaoué ou encore bois du Marin) qui ont révélé une occupation de l’époque de La Tène (Vème siècle au Ier siècle av. J.-C.). Il s’agit manifestement d’un lieu de culte antérieur au temple romain de Mars-Mullo et composé d’une palissade de bois qui semble entourer une série de petits édifices rectangulaires ou circulaires également en bois. On a trouvé dans cette zone cultuelle essentiellement des pièces d’armement (épées, fourreaux d’épées, boucliers, etc.) ainsi que des monnaies et, en moindre quantité, des éléments de parures (fibules, anneaux, etc.).

Après la guerre des Gaules, le site sera totalement réaménagé avec d’importants terrassements pour y installer d’abord un fanum (petit temple de plan carré), puis au IIème siècle on édifiera un immense sanctuaire.

Par contre, il est actuellement difficile de dire si ce sanctuaire gaulois s’intégrait dans un ensemble aménagé plus conséquent. Les fouilles menées au lieu-dit le Grand Chêne au milieu des années 2010 montrent bien une occupation gauloise à partir du IIème siècle av. J.-C. mais cela correspond d’avantage à un site rural avec une petite activité métallurgique. A noter que l’espace ouest de la commune d’Allonnes est occupé par plusieurs enclos dont certains ont été fouillés et semble plutôt appartenir au monde agricole.

 

Des liens :

Le Centre archéologique et le sanctuaire gallo romain Mars Mullo d'Allonnes

Une reconstitution du temple romain d’Allonnes

Un article de Pierre Térouanne

 

Allonnes (Sarthe), sanctuaire de Mars Mullo. Sous l'édifice romain se trouvent les vestiges gaulois.

Allonnes (Sarthe), sanctuaire de Mars Mullo. Sous l'édifice romain se trouvent les vestiges gaulois.

Pièce d'armement gaulois trouvées sur le sanstuaire de Mars-Mullo (dessin T. Lejars)

Pièce d'armement gaulois trouvées sur le sanstuaire de Mars-Mullo (dessin T. Lejars)

Une des fouilles de la Zac du Monné à Allonnes (direction Antoine David)

Une des fouilles de la Zac du Monné à Allonnes (direction Antoine David)

b. Oisseau-le-Petit

Il paraît opportun de relier la fortification de Gesnes-le-Gandelin au site archéologique d’Oisseau-le-Petit.

On trouve à l’Est de la commune de Gesnes le Gandelin, dans le nord de la Sarthe, un lieu champêtre nommé la butte de Saint Evroult. Il s’agit d’un éperon rocheux enserré d’un coté par le ruisseau de l’Aune et d’un autre par le ruisseau de Champ Rouable. Le site, d’environ 3 ha, est protégé par un rempart sur sa partie nord ainsi qu’à l’ouest et au sud. A l’est, c’est le cours du ruisseau de Champ Rouable, situé une trentaine de mètres en contrebas, qui sert de protection. Au milieu de cette structure archéologique se trouve une chapelle dédiée à saint Evroult ; on dit de cette chapelle qu’elle est d’époque romane. Il est d’ailleurs possible que l’actuelle chapelle ne soit qu’une partie d’un ensemble plus important.

Le site est connu depuis longtemps et était considéré au XIXème siècle comme un camp gaulois ou encore comme un oppidum. Il a fait l’objet de fouilles archéologiques entre 1988 et 1990 par Claude Lambert et Jean Rioufreyt. La coupe du rempart a montré divers états allant de l’âge du bronze jusqu’à l’époque carolingienne. Il est à noter parmi le mobilier archéologique découvert la présence de graines (blé, lentille, vesce, etc.). Un sondage a mis en évidence du matériel de la fin de l’époque gauloise (amphores, céramique utilitaire). Enfin du mobilier d’époque carolingienne a également été découvert. Il faut bien sûr mettre en lien l’oppidum de Saint Evroult avec l’occupation antique de la commune voisine de Oisseau-le-Petit. Le site a été classé en 1982.

Et à l’Est de ce site, celui d’Oisseau-le-Petit ne semble pouvoir être dissocié du camp fortifié de Saint-Evroult. La plaine des Noiras est connue depuis le début du XIXème siècle et on évoque même la possibilité que Oisseau soit la capitale du peuple gaulois des Esuviens. Il faut attendre le dernier quart du XXème siècle pour voir réapparaître des éléments de recherches archéologiques. Le site romain se superpose à des structures gauloises telles que des enclos. Cependant, il est encore difficile de nos jours de comprendre la nature globale de cette occupation gauloise. Il manque des fouilles sur de larges étendues ; ce sont sans doute elles qui permettraient de mettre en évidence des structures d’habitats qui pourraient alors être en lien avec les enclos et l’abondance et la variété du matériel archéologique trouvé.

 

Des liens :

A propos de Oisseau-le-Petit

Gesnes le Gandelin (Sarthe), relevé de la fortification de la Saint-Evroult.

Gesnes le Gandelin (Sarthe), relevé de la fortification de la Saint-Evroult.

Gesnes le Gandelin (Sarthe), le rempart de la forticication de Saint-Evroult.

Gesnes le Gandelin (Sarthe), le rempart de la forticication de Saint-Evroult.

Gesnes le Gandelin (Sarthe), la coupe du rempart nord lors des fouilles.

Gesnes le Gandelin (Sarthe), la coupe du rempart nord lors des fouilles.

Oisseau le Petit (Sarthe), le fanum romain est implanté sur un site gaulois.

Oisseau le Petit (Sarthe), le fanum romain est implanté sur un site gaulois.

Oisseau le Petit (Sarthe), un temple romain au milieu d'un vaste enclos gaulois.

Oisseau le Petit (Sarthe), un temple romain au milieu d'un vaste enclos gaulois.

c. Aubigné-Racan

Le site archéologique dit de Cherré sur la commune d’Aubigné-Racan est surtout connu pour ses vestiges romains toujours visibles. Mais les fouilles menées par Claude Lambert et Jean Rioufreyt ont permis de démontrer qu’il y avait une occupation bien antérieure attestée par la présence de tumulus avec des urnes à incinération et par la découverte d’armements gaulois (essentiellement IIIème et IIème s. av. J.-C.) mais aussi de « currency bar » (lingots de fer) dans une zone qui pourrait être en lien avec un sanctuaire.

A un peu plus d’un kilomètre au sud du site de Cherré se trouve la fortification du Vaux surplombant le Loir ; elle fut d’abord occupée au Néolithique puis à l’âge du Bronze et enfin à l’époque gauloise. Mais c’est à cette dernière époque que fut installé un rempart de terre et de pierre complété par une palissade de bois. Il faut sans doute mettre en lien cette fortification avec la nécropole de Cherré et quelques enclos connus dans le secteur.

Il est cependant bien difficile de déterminer la nature de ce site gaulois.

 

Des liens :

La page Wikipédia du site de Cherré

Un petit compte-rendu sur le dépôt gaulois

Aubigné-Racan (Sarthe), des pièces d'armement gaulois (dessin T. Lejars)

Aubigné-Racan (Sarthe), des pièces d'armement gaulois (dessin T. Lejars)

Aubigné-Racan (Sarthe), urnes funéraires provenant des tumulus

Aubigné-Racan (Sarthe), urnes funéraires provenant des tumulus

d. Le Mans

Le passé gaulois du Mans reste une énigme. Autant on a une vue correcte de la ville romaine, autant la présence gauloise qui devrait correspondre à un chef-lieu de cité est plus que ténue. Il faut dire que les observations faites au XIXème siècle sont difficilement utilisables à cause de la disparition du matériel archéologique mais aussi à cause de la méconnaissance de la période et donc de l’interprétation faite des découvertes. En fait, on possède juste un élément décoratif trouvé par Joseph Guilleux en 1977 mais dans un contexte stratigraphique perturbé ; cet embout (élément de bouterolle ? élément de sangle ?) serait daté du Vème s. ou IVème s. av. J.-C.

Ceci-dit, il existe cependant certains indices. Ainsi les fouilles menées aux Jacobins en 2010 par Pierre Chevet ont mis au jour une occupation du milieu du Ier siècle av. J.-C. Les recherches ont permis de découvrir un habitat gallo-romain et un sanctuaire dans la vallée d’Isaac. Mais pour ce qui nous intéresse ici, les niveaux plus anciens ont montré des constructions sur solins ainsi que des fours. Malheureusement l’étude n’a pu être poussée plus avant et il est difficile d’en dire plus pour cet indice de présence gauloise.

 

Des liens :

Le Mans – Place des Jacobins

A suivre : Les sites ruraux gaulois en Sarthe

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