2. Les mentions antiques des Aulerques Cénomans
Les Aulerques Cénomans sont mentionnés dans quelques documents antiques. Jules César dans ses commentaires sur la guerre des Gaules nous dit que lors du siège d’Alésia (52 av. J.-C.), les Cénomans (Aulercis Cenomanis) envoyèrent cinq mille hommes pour aider Vercingétorix. César cite deux autres fois les Aulerques mais sans que l’on puisse préciser s’il s’agit des Cénomans. Au Ier siècle ap. J.-C., Pline l’Ancien dans son Histoire naturelle cite les « Cenomani » lors de sa description de l’Empire ; il classe les habitants de la cité parmi les peuples libres mais qui ne peuvent devenir citoyens romains qu’à titre exceptionnel. Puis au IIème siècle ap. J.-C., Ptolémée dans sa Géographie signale que les Cénomans ont pour capitale Vindinum.
Le célèbre tableau de Lionel Royer (né à Château-du-Loir en 1852) peint en 1899. C'est rempli d'erreurs dont la cuirasse de Vercingétorix qui remonte en réalité à l'âge du bronze et non aux Gaulois.
Il ne faut pas non plus négliger l’Histoire Romaine de Tite-Live rédigée au Ier av. J.-C. A la différences des deux autres références, il ne cite pas les Cénomans dans leur contexte géographique mais comme étant un peuple dont des migrants, menés par Etitovius, franchissent les Alpes pour s’installer en Gaule Cisalpine.
Et puis les Aulerques Cénomans sont cités dans leur propre territoire par deux découvertes archéologiques faites sur la commune d’Allonnes sur le temple de Mars Mullo. La plus ancienne est un fragment de marbre blanc issu des fouilles de Pierre Térouanne en 1961. Cette dédicace à l’Empereur, très incomplète et peut-être du IIème siècle ou du IIIème siècle, comporte deux lignes qu’on peut traduire par « dans sa troisième puissance tribunicienne, deux fois consul […] les Aulerques Cénomans » ; la ligne du dessous présente seulement cinq lettres, AVL CE, mais qui désignent clairement le nom du peuple.
La deuxième dédicace est composée de dix fragments d’une grande inscription et qui ont été trouvés en 1957, et entre 1994 et 1998. Il y a au moins vingt lignes de texte ; malheureusement cela est très fragmentaire mais il est possible d’en comprendre certains points. Le nom de celui qui a offert cette dédicace n’apparaît pas dans les divers fragments, mais il s’agit vraisemblablement d’un très haut responsable, possiblement militaire et sénateur, qui aurait vécu dans la seconde moitié du IIème siècle ou au début du IIIème siècle. La dernière ligne peut-être interprétée ainsi : CIVIT[AS AVLERCORVM CENOMANORVM] ; on a ainsi le deuxième document archéologique qui mentionne le nom de la région anciennement habitée par le peuple gaulois éponyme.
Ces Aulerques Cénomans sont localisés dans un territoire qui correspond approximativement au département de la Sarthe. Mais rechercher une frontière administrative entre les peuples gaulois serait un travail qui n’aurait sans doute pas de sens tant cette notion de limite précise est un concept assez moderne. A l’ouest, pour ce qui correspondrait à peu près à la Mayenne, se trouvent d’autres Aulerques, les Diablintes. Au nord se situent les Esuviens (Orne). Les Carnutes occupent un immense territoire à l’est. Au sud, on trouve les Turons (Indre-et-Loire) et les Andécaves (Maine-et-Loire).
Il est intéressant de constater une sorte de filiation entre les peuples gaulois et les actuels départements. Ce qui est vrai pour l’ouest de la France n’est pas forcément applicable ailleurs. Mais en ce qui nous concerne, cela est lié à l’organisation territoriale romaine, à l’époque augustéenne, qui garde globalement les capitales locales gauloises, même s’il existe des déplacements de sites, puis ensuite à l’organisation médiévale des territoires et enfin à la création des départements au moment de la Révolution.
Quant au sens du nom de ce peuple, il faut avancer avec précaution. Cependant le mot « Aulerques » voudrait dire « ceux qui sont loin de leur lieu », alors que « Cénomans » n’est pas très clair. Roger Verdier voyait dans « Cénomans » « homme éloigné », ce qui serait un pléonasme avec « Aulerques ».
Une carte de 1541 montrant une répartition des peuples gaulois, éd. Michel Servet (source : Gallica)
3. La « fédération » des Aulerques
Il existait quatre peuples Aulerques : Cénomans (région du Mans), Diablintes (région de Jublains), Eburovices (région d’Evreux) et Brannovices (en Auxerrois) . On peut penser qu’ils appartenaient jadis à un ensemble commun, mais honnêtement nous n’avons aucune preuve de cela. Autant les Cénomans et les Diablintes sont voisins que les deux autres sont éloignés.
On comprendra dès lors l’importance de la recherche archéologique pour aller plus loin dans la compréhension de ces peuples gaulois.
A suivre : Les traces laissées par les Cénomans en Sarthe
Des liens :
Les dédicaces d’Allonnes et le sanctuaire de Mars Mullo
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